DALAÏ-LAMA : Compassion 22
6 – Le pluralisme religieux
(Suite de Compassion 21) …/…
(Ndlr – Je rappelle qu’il n’est aucunement question, ici, de faire de prosélytisme (lire par là). Simplement, l’approche des traditions religieuses, dans leur globalité, ne peut que rentrer en ligne de compte dans l’explication que le Dalaï-lama nous donne sur la compassion. D’ailleurs, actuellement on peut simplement constater que les intégrismes sont plus qu’actuels et ne vont pas dans le sens de cette compassion.)
Tant qu’on ne connaît pas la valeur des autres traditions religieuses, il est difficile de les respecter. Or, le respect mutuel est la base d’une harmonie sincère. Nous devons tendre vers un esprit d’harmonie, non pas pour des raisons politiques ou économiques, mais simplement parce que nous avons conscience de la valeur des autres traditions. Pour ma part, je m’efforce toujours de promouvoir l’harmonie entre les religions.
S’inspirer de sa foi pour favoriser les valeurs humaines fondamentales est une démarche très positive. Les principales religions du monde prêchent l’amour, la compassion et le pardon. Bien sûr, chaque tradition le fait à sa manière, mais puisqu’elles visent toutes plus ou moins les même buts -vivre plus heureux, devenir plus compatissant, créer un monde avec plus d’amour-, la diversité de leur méthodes ne pose pas de problème majeur. L’important est finalement de développer l’amour, la compassion et le pardon et, pour aider l’humanité, les principales religions disposent du même potentiel. Certaines personnes ont un penchant pour la foi religieuse et, compte tenu des différentes dispositions qui animent les êtres humains, il est logique que des religions différentes existent. La variété est bénéfique.
J’aimerais maintenant aborder la question de l’harmonie religieuse en distinguant deux niveaux de spiritualité.
Le premier niveau de spiritualité : la foi et la tolérance
Au premier niveau de spiritualité, pour les principales religions et pour les hommes du monde entier ¹, il y a la foi. Je crois que toutes les religions ont un rôle important à jouer, mais pour qu’elles contribuent efficacement au bien de l’humanité, deux facteurs doivent intervenir.
Le premier est que les individus qui adhèrent à ces diverses religions – c’est-à-dire nous-mêmes² – les pratiquent avec sincérité. Les enseignements religieux doivent faire partie intégrante de notre vie et le rester. Parfois, nous entrons dans une églises ou un temple, pour dire une prière ou nous recueillir, puis dès que nous mettons le pied dehors, il ne reste plus rien de cet élan religieux. Ce n’est pas la manière juste de pratiquer. Le message religieux doit demeurer en nous, où que nous soyons. Les enseignements de notre religion doivent être présents dans notre vie, si bien que, le besoin d’inspiration ou de force morale se fait sentir, nous pouvons y avoir recours. S’ils sont constamment présents, nous pouvons les utiliser chaque fois que des difficultés surgissent.
La religion ne peut-être vraiment efficace que lorsqu’elle s’intègre à notre vie. Nous devons connaître ce qu’elle nous enseigne et l’intégrer à notre expérience. Parfois, les différentes idées religieuses ne sont comprises que superficiellement au niveau intellectuel. Or sans un profond ressenti de notre part, l’efficacité de la religion reste limitée. Il faut donc pratiquer avec sincérité ³ pour que notre vie s’en imprègne.
Le deuxième facteur concerne davantage l’interaction entre les différentes religions. Actuellement, en raison des progrès technologiques et du système économique mondial, nous dépendons beaucoup plus les uns des autres. Des pays différents, des continents lointains sont maintenant en étroites relation. A tel point que la survie d’une région du monde dépend de celle des autres. Le monde est donc devenu beaucoup plus interdépendant, ce qui produit d’avantage d’interactions humaines à une plus grande échelle. Compte tenu de ces circonstances, accepter le pluralisme religieux revêt une énorme importance. Autrefois, lorsque les communautés vivaient séparées les unes des autres et que les religions restaient relativement isolées, l’idée qu’une seule religion était possible s’avérait très utile. Mais aujourd’hui, la situation a changé et le contexte n’est plus du tout le même. Il est devenu crucial d’accepter la diversité religieuse et, afin de développer un respect mutuel sincère, un contact étroit entre les religions s’impose. C’est le deuxième facteur qui devrait donner aux diverses religions du monde plus d’efficacité dans leurs œuvres humanitaires. …/…
¹+ ² – Là, on ne parle bien sûr pas de ceux qui sont sans croyances religieuses
³ – Sincérité n’est pas intégrisme
Je tiens ici a préciser mon ressenti par rapport à ce qui est dit. D’après mes humbles connaissances, j’ai pu simplement constater que de presque tout temps, a des époques reculées, ou plus proches et même très proches de nous, que ce soient en Europe, en Asie, mineure ou non, et quasi partout sur le globe, les religions ont malheureusement servi, et servent encore et toujours, de « prétextes » à toutes sortes de brimades, interdits, exclusions et aussi conflits . Ceux-ci servant toujours une même « caste » d’humains : ceux qui veulent le pouvoir, le contrôle, l’hégémonie sur les « autres ». La compassion, bien sûr, en est totalement exclue. C’est pour cela que je pense qu’il faille retenir, de ce qui est dit ici : la foi sincère et la « religion » (pour ceux qui y croient) dans un sens « idéal », je dirais aussi philosophique et spirituel. D’ailleurs, vous le verrez dans la suite des propos du Dalaï-lama.
…/… (A suivre : Le pluralisme religieux : foi et tolérance 2/2)
[Transcription tiré du livre « Les voies spirituelles du Bonheur »]